Une large coalition lance l’initiative « Tous ensemble à l’école »

COMMUNIQUÉ DE PRESSE du 2 décembre 2025A la veille de la Journée internationale des personnes handicapées, une large coalition lance l’initiative populaire cantonale « Tous ensemble à l’école! », pour mettre en oeuvre le droit à une éducation sans discrimination ancré dans la Convention de l’ONU sur les droits des personnes handicapées, ratifiée il y a plus de 10 ans. Il s’agit d’une première en Suisse romande.

« Vivre ensemble s’apprend dès le plus jeune âge. Et aujourd’hui, à Genève, ce n’est pas encore une réalité pour tous les élèves », a déclaré Sophie Demaurex, présidente de la fégaph, membre d’Autisme Genève et du comité d’initiative, députée PS au Grand Conseil genevois, en ouvrant la conférence de presse tenue ce matin chez Insieme Genève, l’association regroupant les parents et proches de personnes avec une déficience intellectuelle.

Ecoles séparées, élèves isolés

En 2022, la Suisse a été sévèrement critiquée pour ses retards en matière d’éducation inclusive lors de son premier examen par le Comité de l’ONU. Genève n’échappe pas à cette réalité. « Plus de la moitié des élèves de l’enseignement spécialisé sont totalement isolés des autres élèves», a relevé Sophie Demaurex. « Pour l’avoir vécu, ce n’est pas acceptable », a poursuivi Eric Vallélian, représentant de Procap et membre du comité d’initiative. Ces élèves séparés sont proportionnellement cinq fois plus nombreux que dans le canton du Tessin. De nombreux enfants passent jusqu’à deux heures par jour dans des transports spécialisés, pour être scolarisés loin de leur quartier, de leurs camarades et de leur famille. « Nous avons fait avancer l’accessibilité, les droits politiques, la future loi sur l’égalité et les droits des personnes en situation de handicap est à bout touchant, mais l’école reste le grand chantier oublié. »

Le lancement de l’initiative intervient alors que le canton prévoit de construire, à l’horizon 2029, sept nouvelles écoles spécialisées séparées, dans le cadre de la loi de crédit 13562 récemment adoptée. « Construire de nouvelles écoles séparées, c’est revenir en arrière. Nous voulons des écoles pour toutes et tous », a martelé Olivier Dufour, vice-président de la fégaph, membre d’honneur du Club en fauteuil roulant de Genève et membre du comité d’initiative. « Notre initiative n’empêchera pas ce projet d’aboutir », a toutefois précisé Cyril Mizrahi, secrétaire général de la fégaph, député PS et membre du comité d’initiative. « Mais ces nouvelles places devront être compensées par la fermeture des places reconnues comme vétustes. Les places supplémentaires devront être créées dans des classes spécialisées, en écoles régulières. Ce type de places a presque doublé depuis 2011, nous devons poursuivre dans cette voie et non revenir à la séparation. »

Que prévoit l’initiative ?

« Notre initiative est simple, équilibrée et pragmatique » a poursuivi Olivier Dufour. « Nous proposons que les ressources de l’enseignement spécialisé soient investies dans l’école régulière, là où les enfants vivent, au lieu de créer des structures parallèles », a précisé Cyril Mizrahi. « Même le Tribunal fédéral le dit : l’inclusion ne coûte pas plus cher que la séparation ».

L’initiative repose sur le modèle éprouvé qui fonctionne depuis longtemps dans le canton du Tessin :

  • Des classes inclusives : jusqu’à 4 élèves ayant besoin de pédagogie spécialisée dans une classe régulière dont l’effectif sera réduit, avec une co-intervention à plein temps d’un ou une spécialiste en pédagogie spécialisée, enseignant-e ou éducateur-trice.
  • Des classes spécialisées dans les écoles régulières : maximum 12 élèves, un·e spécialiste en pédagogie spécialisée pour 3 élèves.
  • Des institutions spécialisées maintenues, mais réservées aux besoins très spécifiques – et sans augmentation du nombre total de places durant la période de transition.

L’initiative prévoit en outre un délai de 10 ans pour planifier la transition, notamment concernant la construction de bâtiments scolaires, avec une possibilité de soutien financier aux communes.

Une initiative bénéfique pour tous les élèves

En grandissant ensemble dans les mêmes écoles, les élèves avec et sans handicap apprennent à se connaître et se respecter, et comprennent les capacités et les limites des autres enfants. Chaque élève peut suivre un parcours correspondant à ses aptitudes. Selon l’étude PISA la plus récente (2022), les élèves du Tessin sont mieux instruits que la moyenne suisse à 15 ans. Il y a également moins d’écarts entre les élèves. « L’initiative propose des solutions diversifiées pour mieux répondre aux besoins spécifiques de chaque élève », a plaidé Céline Laidevant, secrétaire générale d’Insieme Genève. « Nos enfants grandissent vite et nous devons agir maintenant ! »

Une large coalition

Outre les associations membres de la fégaph (notamment Insieme, Autisme, Cérébral et Procap Genève, ainsi que l’Association genevoise des parents d’élèves de l’enseignement spécialisé AGEPES), l’initiative est d’ores et déjà soutenue notamment par la Fédération genevoise des associations de parents de l’enseignement obligatoire (FAPEO), la Fédération des enseignantes et enseignants genevois (notamment la FAMCO et le SSP enseignement), l’Association Inclusion Petite Enfance (AIPE), le PS, les Vert-e-s, solidarités et le MCG. Le comité d’initiative se compose de représentant-e-s d’associations et de partis, ainsi que d’élu-e-s, comme la conseillère administrative de Lancy en charge des écoles Salima Moyard.

« L’objectif, c’est de ne plus séparer les enfants. », a déclaré Christo Ivanov, député UDC et membre du comité d’initiative. « Plus une personne acquiert tôt de l’autonomie, moins les coûts seront élevés par la suite. L’inclusion est un investissement intelligent », a souligné Uzma Khamis Vannini, députée verte et présidente de l’Association romande Pro Mente Sana, également membre de la fégaph. « Il faut se donner les moyens de réaliser l’inclusion dans les faits », a fait valoir Enrico Cambi, éducateur spécialisé, militant de solidarités et membre du comité d’initiative. « Nous appelons à soutenir cette initiative et à signer massivement pour permettre à chaque enfant de trouver sa place dans notre société », a conclu Ana Roch, députée MCG et membre du comité d’initiative.

La Fédération genevoise des associations de personnes handicapées et de leurs proches (fégaph) regroupe et représente 21 organisations d’entraide et de défense. Elle s’engage pour les droits et l’inclusion des plus de 100’000 personnes en situation de handicap de notre canton, ainsi que des personnes proches aidantes.