Archives mensuelles : décembre 2024

Crédit pour de nouvelles écoles spécialisées: halte à la ségrégation des élèves en situation de handicap !

Communiqué de presse de la fégaph

La fégaph a pris connaissance avec consternation du projet de crédit d’investissement déposé par le Conseil d’Etat pour la construction de 7 nouvelles écoles spécialisées à l’horizon 2029. Ce projet a suscité au sein des associations d’entraide et de familles de nombreuses réactions négatives, sur la forme et sur le fond. L’exposé des motifs stigmatise de manière inacceptable les élèves concernés pour justifier leur mise à l’écart. La fégaph s’oppose à l’augmentation du nombre de places dans des écoles séparées, qui est contraire à la Convention de l’ONU sur les droits des personnes handicapées, car l’essentiel des élèves concernés peut fréquenter une école régulière, soit grâce au co-enseignement soit au sein de classes spécialisées.

Le Grand Conseil va devoir se prononcer sur un projet de loi (PL 13562) ouvrant un crédit d’études et d’investissement de 42,5 millions de francs en vue de la construction de 7 écoles de pédagogie spécialisée (ECPS) sur les communes de Vernier, d’Onex et du Grand-Saconnex. A l’appui de cette demande, l’exposé des motifs décrit les enfants en situation de handicap comme « imprévisibles, bruyants et démonstratifs ». Jusque-là, ce sont des enfants… Mais attention, il faut créer un « lieu sécurisant », car leurs manifestations sont « faites régulièrement de violences », et cette « instabilité permanente » doit être « canalisée » dans des écoles séparées dépeintes comme des « refuges cruciaux ».

Sous un vernis faussement bienveillant, cette description est indécente et choquante pour les familles concernées et les associations qui les représentent. En effet, les difficultés rencontrées par certains élèves sont généralisées pour décrire les élèves ayant besoin de pédagogie spécialisée au moyen de stéréotypes et les stigmatiser pour justifier leur mise à l’écart complète des autres élèves au sein d’établissements pudiquement qualifiés de « en site propre », comme si on parlait de politique des transports et non d’enfants.

La préférence est explicitement donnée à des lieux éloignés du centre, au détriment de la qualité de vie et de l’inclusion dans la vie de quartier. Les enfants continueront de passer un temps considérable dans des transports coûteux pour la collectivité, sans possibilité de rencontrer les enfants habitant dans leur quartier. Il s’agit ni plus ni moins de la perpétuation d’une politique de ségrégation prohibée par la Convention de l’ONU sur les droits des personnes handicapées.

Conformément à l’art. 24 de cette convention, il ne saurait y avoir d’égalité séparée. Rappelons que la Cour suprême des États-Unis l’a dit il y a septante ans lorsqu’elle a interdit la ségrégation raciale dans les écoles. Genève a mis fin il y a cinquante ans à la séparation scolaire entre garçons et filles. Mais en ce qui concerne les élèves avec handicap, en 2024, le Conseil d’Etat, au lieu de planifier leur inclusion dans les écoles régulières, continue de programmer leur ségrégation à l’horizon 2029 en tout cas. De surcroît, conformément à l’article 8 al. 2 de la loi sur l’instruction publique (LIP), il appartient aux communes, et non au canton, de fournir les bâtiments, les terrains accessoires et le mobilier nécessaires à l’enseignement régulier et spécialisé, pour tous les élèves du degré primaire. Le projet du Conseil d’Etat est donc également contraire à la LIP concernant l’enseignement primaire.

Quoi qu’il en soit, scolariser les enfants dans les mêmes écoles ne coûte pas plus cher, mais permet de préparer la société à accueillir les personnes avec handicap en son sein. Plusieurs cantons, comme le Valais et le Tessin, pratiquent ainsi depuis des dizaines d’années, pour le bien de tous les élèves. C’est pourquoi la fégaph demande que les moyens financiers pour la pédagogie spécialisée soient investis dans des écoles accueillant tous les élèves, soit grâce au co-enseignement soit dans des classes spécialisées. Si nécessaire, la fégaph envisage de contester en justice l’ouverture de nouvelles structures séparatives.

La Fédération genevoise des associations de personnes handicapées et de leurs proches (fégaph) regroupe et représente 21 organisations d’entraide et de défense. Elle s’engage pour les droits et l’inclusion des plus de 100’000 personnes en situation de handicap de notre canton, ainsi que des personnes proches aidantes.